
Et si la reconquête américaine des puces passait moins par le silicium que par la façon de l’assembler ? Il faut dire que le goulot d’étranglement du packaging reste le maillon faible de la souveraineté technologique aux États-Unis.
Intel pousse son avantage dans l’Encapsulation avancée
D’après les informations disponibles, Intel Foundry met en avant un portefeuille d’assemblage 2D, 2,5D et 3D capable d’optimiser coût, consommation et bande passante au niveau système. Au cœur du dispositif : EMIB, un pont en silicium intégré au substrat qui assure un routage die-to-die dense sans recourir à un interposeur pleine taille.

Des variantes comme EMIB-M (condensateurs MIM intégrés) ou EMIB-T (TSV) visent des liaisons à forte densité, notamment entre logique et HBM. En parallèle, la famille Foveros (S, R, B et Foveros Direct) s’adresse aux besoins de très haut débit ou d’efficacité énergétique via l’empilement 3D et l’hybrid bonding Cu-à-Cu.

Cette panoplie a déjà fait ses preuves : Ponte Vecchio, avec EMIB en 3,5D, combine plus de 100 milliards de transistors, 47 tuiles actives et cinq nœuds sur une seule puce, au service du supercalculateur exascale Aurora. Preuve que l’encapsulation avancé constitue une valeur à part entière dans l’offre d’Intel.

Le contexte joue en faveur de Santa Clara. Si TSMC produit des wafers 4 nm en Arizona, ceux-ci doivent encore repartir à Taïwan pour le packaging, une faille critique pour une chaîne 100 % domestique. Intel pourrait donc capter des volumes d’encapsulation pour des clients variés, y compris ceux de TSMC, sans forcément fabriquer le silicium sous-jacent. Reste à voir jusqu’où l’entreprise poussera cette activité externe.
18A aujourd’hui, 14A High‑NA demain : la feuille de route
Sur le front des nœuds, Intel mise sur 18A et ses déclinaisons 18A‑P et 18A‑PT pour durer. Lors des résultats du troisième trimestre, le directeur financier David Zinsner a déclaré : « Nous ne sommes pas au pic d’offre pour 18A […] ce nœud sera assez longévif ». De quoi améliorer les rendements et décliner l’offre du mobile au HPC et à l’IA tout en préservant la capacité pour les clients externes.

Mais le véritable saut compétitif viendrait avec 14A, premier design industriel en EUV High‑NA. Intel affirme avoir traité plus de 30 000 wafers en un trimestre avec cette exposition, simplifiant la fabrication : certaines couches passent d’environ 40 à moins de 10 étapes, pour des cycles plus rapides. À ce stade, 14A atteindrait de meilleurs jalons que 18A, en coordination avec des partenaires externes pour préparer la production de volume.
Face à cela, TSMC avance avec Amkor : un site d’environ 7 milliards de dollars (environ 6,5 milliards d’euros) en Arizona doit assurer packaging et tests à partir de 2028, la construction visant la mi‑2027. Une réponse tardive, mais structurante, pour rapatrier l’assemblage à proximité de la Fab 21.
Intel dispose déjà d’un catalogue EMIB/Foveros opérationnel, le 18A s’installe dans la durée et le 14A High‑NA promet un gain de complexité et de cadence. De quoi offrir, à court terme, une option d’encapsulation américaine qui intéressera quiconque veut éviter un aller‑retour transpacifique.
La question, désormais, est politique autant qu’industrielle : Intel étendra‑t‑il son service d’encapsulation à grande échelle sans lier ses clients aux nœuds maison ? Une équation qui pourrait redessiner l’équilibre des forces sur le sol américain.
Source : TechPowerUp